La mal aimée
Aujourd'hui incontournable lorsque l'on va à Lille, la villa Cavrois ne fit pourtant pas bonne impression dans son voisinage lors de sa sortie de terre !
Si les visiteurs s'extasient depuis 2015 sur la parfaite harmonie des volumes, le soins des détails, le choix et la mise en oeuvre des superbes matériaux dont la rénovation a respecté au plus près la volonté de Robert Mallet-Stevens, l'architecte qui en est l'auteur, les invités et voisins invités à l'inauguration en 1932 ne furent pas du même avis.
Ils la nommaient "folie", "horreur", "paquebot à la dérive" ou encore "péril jaune" ! C'est dire l'enthousiasme !
Il est vrai qu'à l'époque, elle dénotait totalement dans son environnement où se nichaient, dans la verdure, de grandes maisons bourgeoises aux toits en pente et au style anglo-normand, construites au XIXème siècle pour les familles d'industriels dont les usines étaient proches, à Tourcoing ou à Roubaix.
Monsieur Cavrois n'était pas ni un artiste, ni un collectionneur, ni même un mécène. Il possédait aussi une usine de textile et avait contacté un architecte de la région tout à fait traditionaliste pour réaliser sa maison.
Sa rencontre, avec Mallet-Stevens, lors de l'exposition internationale des arts décoratifs et industriels modernes au Grand Palais à Paris fut décisive. Il découvre un univers, une nouvelle architecture où espace, lumière et hygiène sont omniprésents.
Si Monsieur et Madame Cavrois apprécièrent leur demeure, il en fut moins le cas de leurs enfants qui finirent par céder la villa devenue trop lourde financièrement à un promoteur immobilier qui l'abandonna totalement.
La renaissance
Je passerais sur les épisodes rocambolesques que ce bâtiment devenu iconique de l'architecture moderne des années 20 a subit. Toujours est-il qu'après avoir été racheté par l'état en 1990, ce n'est qu'en 2003 que des travaux titanesques de rénovation, de résurrection pourrait-on dire, commencèrent.
La villa, alors dans un état pitoyable, a pu retrouver son lustre d'antan. Meublée au fur et à mesure des achats de meubles de l'époque, dûs pour la grande majorité à l'architecte lui-même, et certains à Jean Prouvé et à Marcel Breuer.
Pour donner une petite idée de l'état dans laquelle se trouvait la villa avant la rénovation, voici les photos d'une des pièces qui n'a pas été rénovée.
Pour ceux qui n'ont pas encore eu la chance de pouvoir la visiter, voici une petite visite du lieu en image...
Je commencerai par quelques images de l'extérieur, sous un beau soleil qui met en valeur les briques jaunes parfaitement alignées, les reflets sur l'eau de la piscine ou du grand bassin dans lequel elle se reflète...
Et bien sûr l'intérieur... dont les moindres détails sont inspirants !
L'impressionnant cache radiateur de l'entrée et les appliques dessinées pour la villa.
L'immense cuisine noire et blanche (comme toutes les pièces d'eau !) et son magnifique meuble de rangement circulaire, un des rares éléments d'origine.
La salle à manger en pleine lumière, avec une vue grandiose sur le parc.
La grand salon en double hauteur dont le mobilier a été installé récemment, vu de la passerelle du niveau supérieur. On peut remarquer le parquet mosaïque typique des bâtiment de l'époque. Chaque lame endommagée a été remplacée une à une par des parqueteurs de talent... qui ont eu beaucoup de patience vu les dimensions impressionnantes de la villa (2800 m2 de plancher en tout... OK on supprime les pièces humides, la salle à manger et l'escalier, mais tout de même !)
Admirez l'escalier très graphique, le calepinage du sol, l'immeuble baie vitrée sur le jardin. On retrouve le même cache radiateur que dans l'entrée.
L'étonnant détail des contremarches de l'escalier de la zone enfants en tôle ondulée.
Je terminerai sur une photo de l'ancien tableau électrique comme on en voit plus !
... et l'ancienne chaufferie !
Pour plus d'info : https://www.villa-cavrois.fr/
